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En lisant Claude Tresmontant : La Création est un don, une jubilation dyonisiaque…

Quel dommage ! Je n’étais pas au Forum sur la Pensée de Claude Tresmontant, qui vient d’être organisée à Lyon. On va se consoler en méditant quelques pages d’un de ses premiers livres : L’Essai sur la connaissance de Dieu. 1955   Quand on est génial, ça ce voit dès les premières œuvre…

TRESMONTANT-Essai sur la Connaissance de Dieu – p110

La matière semble travaillée, traversée par un élan de conscience organisatrice, par une intelligence créatrice.

L’intelligence qui a opéré et qui continue d’opérer dans le monde,
qui en a organisé la multiple structure, qui en constitue l’intelligibilité,

La création est don. Elle est don pour l’homme.

L’existence est don, et la création est don pour les êtres existants.

La création est don.

Elle est don pour l’homme.

la création tout entière est don,
la pluie, le soleil, le pain et l’eau,
l’homme pour la femme et la femme pour l’homme, sont don et joie.
La beauté du monde est don, sa saveur, sa splendeur.
La nature est jubilation.

Avant le mal et la souffrance, …il y a eu un DON !

Pour qu’il y ait problème du mal, souffrance et mort, il faut d’abord qu’il y ait vie.


Le problème du mal est un problème dont on ne saurait surestimer la gravité,
mais c’est un problème second par rapport à l’exis­tence et à la vie.

le monde apparaît comme la manifestation d’un amour créateur.
L’ Absolu est don et amour.

La création est don :

La création est don :
d’abord ce don de l’être que nous sommes,

ce don de l’existence pour nous qui sommes.

Puis, à ces êtres créés,
a été fait le don des biens de la création.

A ces êtres désirants, a été fait le don de ce qu’ils désirent.

A cette faim, le don du fruit.

Pour l’homme, le don que constitue la femme,

pour la femme ce don qu’est l’homme.

La beauté de la création.

Après tout, la création pourrait être terne, grise, avare.
Elle est luxueuse, surabondante,
et la beauté est son caractère le plus universel.

Cette beauté, ce luxe de la création, indique qui est Dieu :

Cette beauté, ce luxe de la création, indique qui est Dieu :

Il n’est pas ce dieu avare et triste, rancunier et comptable, mesquin,

que veulent nous imposer tant de traités de spiritualité.

Dieu est jubilation,
son œuvre qui le manifeste est jubilation.



Ce caractère dionysiaque que les anciens avaient aperçu dans la création… est bien l’œuvre du Créateur.


Ce don de la femme qui est fait à l’homme,
ce n’est pas le don d’un dieu chagrin, puritain, ni jaloux.

La beauté de la femme, la beauté de l’homme,
qui sont l’un pour l’autre mutuellement don, sont enseignement sur le Dieu créateur, le Dieu vivant.

Le visage de la femme nous enseigne davantage sur Dieu que tous les traités de spiritualité.

La délectation, la volupté que l’homme et la femme connaissent en se connaissant, sont aussi I’œuvre de Dieu, et signes de Dieu.

Malgré l’horreur du monde, le mal qui sévit dans le monde ?

Cette beauté, cette jubilation, cette volupté
qui est pour une part l’essence de la création,
ne doit pas nous faire oublier, et nous n’avons garde de l’oublier,
l’horreur du monde, le mal qui sévit dans le monde.

L’un et l’autre existent de fait, dans notre expérience.
Selon les tempéraments, les auteurs minimisent l’un ou l’autre,
majorent l’un ou l’autre aspect.

A Somali woman holds her son among many other women at the refugee camp in Baidoa. ca. August-September 1992 Baidoa, Somalia

Aussi bien que la beauté, l’horreur du monde ne saurait être exagérée,
mais ce qu’il convient de ne jamais perdre de vue,
c’est qu’ils existent tous les deux, et constamment.

Dès le niveau biologique, l’horreur semble régner, en constatant le chagrin de la bête qui voit son petit dévoré sous ses yeux.

Dès le règne purement animal, l’ entre-dévorement, le massacre est la loi.

Au plan humain, les choses s’aggravent.
Le lion qui dévore une gazelle accomplit un. acte purement biologique, physiologique, inscrit dans sa nature, et nécessaire.

L’homme qui opprime, qui tue ou qui torture l’homme, n’accomplit pas un acte biologique ni physiologique nécessaire.

L’acte humain n’est plus un acte purement biologique.
Il s’y ajoute la gra­tuité qui est propre au plan humain, au plan éthique.

Lorsqu’on aborde le problème du mal, il faut donc distinguer plusieurs choses :

1—  Un plan naturel, biologique :
il y a, apparem­ment, du mal, ou du moins de la douleur, dans la création au niveau purement biologique.
Du mal subi, mais non du mal au sens éthique.
De cela au moins l’homme n’est pas responsable.

2—  Ce plan biologique se continue d’une certaine manière et dans une certaine mesure avec l’appa­rition de l’homme.
L’animalité se continue en l’homme, et il reste encore du biologique dans certains phénomènes d’expansion humaine, et peut-être dans la guerre elle-même.
Le déferlement des hordes qui ont envahi l’Asie Mineure au rve millénaire avant notre ère, n’est sans doute pas essentiellement différent du processus vital et biologique en vertu duquel le lion mange la gazelle lorsqu’il a faim.
Une certaine expansion biologique est naturelle, nécessaire, saine.

Mais l’homme ajoute quelque chose de nouveau :

il apporté avec lui la dimension éthique.

Il apporte le mal, au sens éthique, le mal superflu, le mal per­vers.

Il défigure la création,

il défigure l’homme son frère,

il se défigure lui-même.

Il détruit, il massacre, il torture, il opprime, il humilie.

3— Il faut enfin se souvenir que, quelle que soit l’horreur qui règne dans la création,

en vertu de sa structure même, ou par la faute de l’homme,

ce mal, cette horreur, n’annulent pas

la beauté, l’ex­cellence, la saveur et les délices de l’existence et de la création,

mais s’y ajoutent, d’une manière si l’on peut dire complémentaire.

Le fait du mal n’en­lève rien au fait primordial de l’excellence et de la splendeur de la création.

Il faut garder ces deux faits, ces deux données, fermement en main, et d’une manière simultanée, si l’on veut penser le phénomène tel qu’il se présente.

Ne voir que l’hor­reur, comme les gnostiques, et déclarer que la créa­tion est foncièrement mauvaise, c’est délirer : c’est oublier toute la part de paix et de beauté de la vie.

Ce qu’il nous importe de souligner ici, eu égard à notre problème de la connaissance de Dieu,

c’est qu’on ne peut pas annuler le fait primordial,
à savoir l’existence et l’excellence de la création,
en invoquant un élément réel de cette création, à savoir le mal qui y sévit.
Car le mal est dans la création.

Le problème du mal ne saurait annuler la démarche par laquelle, à partir de la création, on accède à la con­naissance du Dieu créateur.
Le problème métaphysique de l’être créé demeure, e
t le problème du mal ne saurait contraindre la réflexion à nier l’Être incréé et créateur,
au nom du mal qui règne partiellement dans la création.

disons ici seulement que la distinction entre le mal subi, ou mal physique,
qui règne apparemment dans la création, en vertu même de sa construction,
et le mal que l’homme fait, et qui n’est pas nécessaire, est importante,

car il n’est pas légitime de rejeter sur le Créateur le mal que l’homme fait,
si l’on prend au sérieux cet Homme qu’il a créé, pour être maître de son destin,
et pour jouer librement le jeu de dieu créé,
qui fait l’appren­tissage de son métier de dieu.

Les insuffisances, les inachèvements et les douleurs de la création restent un problème,
mais il convient de ne pas mêler ce problème à celui de la liberté de l’homme et de ses fruits amers.

Fin du chapitre

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