
4e méditation : Qui est mon prochain ?

Accueil » 1 – MA MEDITATION DE CE JOUR ? (Page 2)
Le bon Pasteur donne sa Vie pour ses brebis…
II y a quelque part ailleurs, je ne sais où,
une maman qui cache pour la dernière fois
son visage au creux d’une petite poitrine qui ne battra plus,
une mère près de son enfant mort,
qui offre à Dieu le gémissement d’une résignation exténuée,
comme si la voix qui a jeté les soleils dans l’étendue,
ainsi qu’une main jette le grain,
la voix qui fait trembler les mondes,
venait de lui murmurer doucement à l’oreille:
“Pardonne‑moi !
Un jour, tu sauras, tu comprendras,
tu me rendras grâce.
Mais maintenant, ce que j’attends de toi,
c’est ton pardon,
pardonne ! «
Ceux‑là se trouvent au coeur du mystère,
au cœur de la création universelle,
et dans le secret même de Dieu.
GEORGES BERNANOS – LA LIBERTÉ, POUR QUOI FAIRE ?
Mes lectures du jour
Je venais de me lever, d’écouter France Info, de m’indigner ( je ne sais plus de quoi),
de m’émouvoir (je ne sais plus de quoi non plus ), de ricaner de la sottise,
de me sentir BON, satisfait,
de me préoccuper des infimes problèmes de ma vie quotidienne,
…lorsque j’ai eu le malheur d’ouvrir distraitement un livre, et de recevoir cette gifle en pleine figure.
Merci aux poètes ( …on croirait de la prose de Rimbaud) qui, pour quelques instants, nous sortent de notre hébétude !
ET VOUS ? est-ce que, comme moi, vous vous sentez concernés par ces imprécations terribles ?
Philippe Claudel
Préambule du roman : L’archipel du chien (2018)
(c’est moi qui ait lourdement souligné en gras les phrases qui m’interpellent.
Claudel est plus discret, …et d’autant plus féroce )
Vous convoitez l’or et répandez la cendre.
Vous souillez la beauté, flétrissez l’innocence.
Partout vous laissez s’écouler de grands torrents de boue.
La haine est votre nourriture, l’indifférence votre boussole.
Vous êtes créatures du sommeil,
endormies toujours, même quand vous vous pensez éveillés.
Vous êtes les fruits d’une époque assoupie.
Vos émois sont éphémères,
papillons vite éclos, aussitôt calcinés par la lumière des jours.
Vos mains pétrissent votre vie dans une glaise aride et fade.
Vous êtes dévorés par votre solitude. Votre égoïsme vous engraisse.
Vous tournez le dos à vos frères et vous perdez votre âme.
Votre nature se fermente d’oubli.
Comment les siècles futurs jugeront-ils votre temps ?
Philippe Claudel 2018
Ne vous inquiétez pas pour moi pas pour moi, ô chers (éventuels ) lecteurs !
Ce ne sontque les petits soucis du monde…
qui ont mis en panne ce blog, qui ne se renouvelle plus guère depuis quelques mois.
Heureusement, je reçois, ce matin, une salutaire admonestation de mon vieil ami, le Cardinal Newman ! Elle me concerne pleinement,
mais vous pourrez peut-être en tirer profit, vous aussi . Michel Minc
Commencez dès maintenant, votre résurrection ! Sortez du tombeau ! (…)
Abandonnez vos préoccupations !
…les jalousies, les soucis,
les ambitions du monde,
l’esclavage de l’habitude,
le tumulte des passions,
les fascinations de la chair,
l’esprit froid, terre à terre et calculateur,
la légèreté, l’égoïsme, la mollesse,
la vanité et les manies de grandeur.
Efforcez-vous désormais de faire ce qui vous paraît difficile,
mais qui ne devrait pas, ne doit pas être négligé :
veillez, priez et méditez…
Montrez que votre cœur, vos aspirations et toute votre vie
sont avec votre Dieu ! Réservez chaque jour un peu de temps pour aller à sa rencontre…
Je ne vous demande pas de quitter le monde,
ni d’abandonner vos devoirs sur cette terre,
mais de reprendre possession de votre temps.
Ne consacrez pas des heures entières aux loisirs ou à la vie en société,
alors que vous ne consacrez que quelques instants au Christ.
Ne priez pas uniquement quand vous êtes fatigués et au bord du sommeil ; Conduisez-vous selon les paroles des Saintes Écritures : « Recherchez les réalités d’en-haut ».
Montrez votre appartenance au Christ, car votre cœur « est ressuscité avec lui » et « votre vie est cachée en lui » (Col 3,1-3).
Bienheureux John Henry Newman (1801-1890), cardinal, théologien,
PPS, vol. 6, n°15 « Rising with Christ »
Une belle méditation de l’artiste anonyme, représentant du « street art » anglais, philanthrope, contestataire, pacifiste…
Redisons avec Rainer Maria Rilke :
RAINER MARIA RILKE 1910
14 février – Faire jaillir la source cachée
« Quand je parlerais les langues des hommes et celles des anges, s’il me manque l’amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante.
Quand j’aurais le don de prophétie, la connaissance de tous les mystères et de toute la science, quand j’aurais la foi la plus totale, celle qui transporte les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien …
L’amour prend patience; il est généreux, il ne jalouse pas, il ne s’enfle pas d’orgueil, il ne fait rien de laid, il ne cherche pas son intérêt, il ne s’irrite pas, il ne pense pas à mal … » (Première lettre de Paul aux Corinthiens, chapitre 13).
Tandis que je lisais ce texte, que se passait-il en moi?
j’avais l’impression qu’une baguette de sourcier venait frapper la surface durcie de mon cœur et en faisait aussitôt jaillir des sources cachées.
Et me voilà agenouillée tout à coup près de ma petite table, tandis que, comme libérée, l’amour me parcourait tout entière, délivrée de l’envie, de la jalousie et des antipathies …
(Etty Hillesum – Camp de Westerbork – Février 1942)
Toute souffrance a été partagée…
RAINER MARIA RILKE
TRADUCTION JEAN-MICHEL MAHENC 1994
Comme ce poème magnifique, caractéristique de la poétique et de la spiritualité de Rilke est difficile à comprendre et à traduire, je vous met ici le texte original en allemand, évidemment plus court et plus sibyllin, pour les « happy few » germanophones :
RAINER MARIA RILKE